30 novembre - fin de journée + "à trois" - dragon age
Titre : Le corniaud, la vaurienne et l'empoisonneur.
Auteur : kethry_raven
Jour/Thème : 30 novembre, fin de journée& thème du mois "à trois"
Fandom : dragon age
Personnage/couple : Alistair Theirin, Briana Theirin (PC humaine noble), Zévran Arainai
Rating : PG-13
Disclaimer : L'univers de Dragon Age appartient à Bioware, je ne fais que l'emprunter pour y jouer.
Participation au vote de fin de mois : oui
Note : Gros spoilers sur la fin d'Origins et de l'add-on Awakening. Par contre pour un non joueur, peut se lire comme une originale, il y a suffisamment d'explications pour comprendre le texte et son univers.
Alistair se déplaçait d'un pas vif le long des couloirs afin d'atteindre sa chambre, son refuge après une dure journée passée à écouter les Banns se plaindre et signer des papiers à tout va. Rien que de savoir que son épouse l'attendait lui fit accélérer le pas, pressé de pouvoir enfin se débarrasser des ses vêtements de cérémonie royaux, mais aussi de pouvoir enfin profiter d'un moment d'intimité avec Briana. Ils discuteraient des affaires du pays et elle lui apporterait ses conseils éclairés, puis ils parleraient de l'avancement de la reconstruction de l'Ordre des Gardes des Ombres et des dernières nouvelles de Fort Bastel.
Ne plus être un simple Garde des Ombres qui ne se préoccupait que du prochain combat contre les Engeances commençait à lui peser. Si on lui avait dit qu'un jour il regretterait de ne plus pouvoir se battre contre ces monstres corrompus, il leur aurait ri au nez.
Sur son passage, Alistair salua les gardes et les gens de service qu'il croisa.
Finalement arrivé, il eut la surprise de trouver Briana faisant les cent pas. Il remarqua le pli au milieu de son front qui n'apparaissait uniquement que lorsque celle-ci était vraiment préoccupée. La plupart du temps, son visage restait impassible. On aurait pu croire que rien ne la touchait, mais ce n'était pas le cas car Alistair savait que son épouse était en permanence maîtresse de ses émotions. Ce n'était pas pour rien qu'elle était une voleuse hors pair et même si parfois ses méthodes expéditives le gênaient, il ne pouvait nier qu'elles portaient leur fruit. Briana lui avait permis plus d'une fois d'obtenir la coopération « enthousiaste » des Banns. Ce qui n'était pas une mince affaire étant donné que chacun d'eux était persuadé de la préséance de ses exigences. On pouvait toujours compter sur les nobles de Férélden pour se plaindre sans arrêt.
Il remerciait chaque jour le Créateur de l'avoir mise sur son chemin.
Briana était tellement préoccupée qu'elle ne s'était toujours pas rendue compte de sa présence. Oh, cela ne présageait rien de bon.
- Envisagerais-tu de construire une tranchée dans notre chambre, mon aimée ?
Briana sursauta avant de se tourner vivement vers lui, la dague à la main. Lorsqu'elle le reconnut, son arme disparut promptement dans le pli de ses vêtements.
-Alistair ! Par le souffle du Créateur, tu m'as surprise. Soit plus prudent, la prochaine fois je risquerais de commettre un régicide avant de m'en rendre compte.
-Ce n'est pas de ma faute si tu commences sérieusement à te ramollir, répondit-il malicieusement, cette vie de palais commence à émousser tes réflexes. Si tu continues comme ça, bientôt je n'aurais plus besoin de me fatiguer pour te battre en duel.
-Vraiment ? répondit-elle narquoise, j'attends de voir ça !
Malgré son sourire apparent, il vit que ses piques ne l'avaient pas totalement détendue. Il s'approcha donc lentement d'elle et lui attrapa doucement le bras, puis porta sa main à ses lèvres l'effleurant d'un baiser. Elle frémit, mais ne se dérida pas pour autant.
-Alistair, il faut que nous parlions, annonça-t-elle gravement.
Il reconnaissait ce ton. C'était celui de la Reine Briana Theirin, celui qui impliquait qu'il n'allait pas aimer ce qui suivrait, qu'il contesterait vivement mais finirait par accepter à contre- cœur.
Il se souvint de la dernière fois où elle l'avait employé : lorsqu'elle avait décidé de nommer Nathaniel Howe responsable de l'Ordre des Gardes des Ombres en son absence, et lui avait plus ou moins rendu ses terres; cette nomination avait provoqué des vagues car Nathaniel était le fils de celui qui avait trahi et assassiné sa famille et avait tenté lui aussi de l'éliminer.
Mais Briana croyait à la vertu d'une seconde chance et ce n'était pas la première fois qu'elle épargnait et employait à son avantage quelqu'un qui avait essayé de l'abattre. Ce fichu elfe en était un parfait exemple.
Et puis ce n'était pas comme si l'avenir en tant que Garde des Ombres était attractif. Avec une chance sur trois de mourir durant la cérémonie de l'Union et une espérance de vie d'environ trente ans, peut-être avait-elle escompté sur le fait que Nathaniel meure rapidement.
Et même s'il ne l'avouerait jamais, au fond, il savait qu'elle avait fait les bons choix. Cependant sa générosité avait des limites : Howe et Loghain n'avaient pas eu cette chance. Pas de pardon pour le traître et le régicide.
Il soupira, se passant nerveusement la main sur la nuque. Puis décida qu'être assis serait une bonne idée.
-Dis-moi tout.
Briana prit une profonde inspiration avant de se lancer, le regardant droit dans les yeux :
-Tu sais que cela fait plus d'un an que nous sommes à la tête du royaume. Beaucoup de choses ont été détruites depuis la fin de l'Enclin et tout Férélden est en pleine reconstruction. Les temps sont durs pour notre peuple, ainsi que pour la noblesse. Nous sommes faibles et l'impératrice d'Orlais songe à en profiter. Ils souhaitent remettre Anora sur le trône ou tout du moins, sa lignée. Je pense qu'ils ne se gêneront pas pour la tuer elle et mon frère. De plus comme leur fils est trop jeune, n'importe qui pourrait assurer la régence. En étant Gardes des Ombres, nous pouvons disparaître à tout moment et laisser le trône vacant. Nous ne pouvons pas permettre cela. Nous devons consolider notre position sur le trône., elle reprit une inspiration, Alistair, il nous faut un héritier.
-Aurais-tu oublié qu'il est presque impossible pour deux Gardes des Ombres de concevoir ? Lorsqu'un seul des parents l'est, c'est déjà un miracle qu'un enfant naisse. Pour nous c'est impossible et un héritier, ça ne pousse pas sur les arbres.
Alistair n'était pas sûr de savoir où elle souhaitait mener cette conversation. Il était vrai que ces derniers temps, Eamon évoquait le sujet de moins en moins subtilement. Il avait même suggéré peut de temps auparavant de répudier Briana si elle ne concevait pas un héritier dans l'année. Il l'avait stoppé net, il était hors de question qu'il prenne quelqu'un d'autre à ses côtés. Avec le ton glacial qu'il avait employé, il s'était assuré qu'Eamon n'évoque plus jamais le sujet en sa présence.
Il appréciait que son père adoptif soit à ses côtés pour lui prodiguer des conseils avisés, mais pas comme conseiller marital. Il n'en n'avait cependant pas parlé à Briana, craignant qu'elle n'aille lui expliquer crûment sa façon de penser.
-Je le sais bien, mais j'ai une solution.
-Vraiment ? répondit-il le sourcil haussé et le bras croisés, je serais curieux de l'entendre. Serait-ce encore un sort ancien et inconnu ? Questionna-t-il, plaisantant à moitié.
Briana sursauta comme s'il l'avait giflé. Le rituel de Morrigan était encore un point sensible. Il la vit serrer les poings jusqu'à s'en faire blanchir les jointures. Elle prit une profonde inspiration avant de répondre :
-Absolument pas, mais il est vrai que comme cette fois-là, tu ne vas sûrement pas aimer.
-Pourquoi ne suis-je pas surpris ? soupira-t-il, de toute façon, après que tu aies suggéré de libérer Anora pour la marier à ton frère, je crois ne plus pouvoir être étonné. Explique-moi ton plan.
-J'ai demandé à Zévran de me faire un enfant, avoua-t-elle dans un souffle.
-Pardon ?!? répondit-il incrédule.
De toutes les solutions qui lui avaient vaguement traversé l'esprit, celle-ci n'en faisait certainement pas partie. Se rappelant une autre conversation plus d'un an auparavant, il sut qu'elle ne plaisantait pas. Finalement, il semblait qu'elle soit toujours capable de l'étonner.
-Pourquoi lui ? finit-il par demander.
Ce maudit elfe ne pouvait-il pas les laisser en paix ? Durant tout leur périple ensemble il n'avait pas arrêté d'essayer de corrompre tout le monde. Il s'était aussi étroitement attaché à Briana et l'observait plus attentivement que l'on s'y attendait d'un simple ami. Il l'avait même surpris une ou deux fois regardant dans sa direction.
Mais il se rendit compte qu'il ne refusait même pas l'éventualité, Briana le menait vraiment par le bout du nez. Pourtant, il aurait dû faire une scène, hurler, casser un ou deux meubles et pour finir claquer violemment la porte. Mais il savait déjà que cela ne servirait à rien. Elle avait raison, une fois de plus. Lorsque son demi-frère était mort sans héritier, le royaume avait sombré dans le chaos. Il avait fallu deux ans pour tout réorganiser et lui, le bâtard caché avait été promu roi.
Finalement s'était peut-être sa punition pour avoir conçu un enfant avec Morrigan.
-Pourrais-tu supporter qu'un inconnu pose ses mains sur moi ? l'interrogea-t-elle brusquement.
Alistair frémit à l'idée d'hommes sans visages caressant sa femme. Puis il remplaça ceux-ci par l'elfe et même si la jalousie le dévorait, il ne ressentait pas de colère.
-N'y avait-il vraiment personne d'autre ? questionna-t-il plaintivement.
Briana secoua négativement la tête.
-Non, commença-t-elle doucement, il est le candidat idéal. Suffisamment proche de nous pour n'en parler à quiconque et rester discret. De plus, s'il tient à être présent dans la vie de son enfant, il aura la possibilité de le faire sans que cela paraisse suspect.
-Tu en es sûre ? insista-t-il.
-Absolument, j'ai confiance en lui.
Son regard ne vacilla pas.
-Quand comptes-tu le voir ?
-Le plus tôt possible. Étant donné nos problèmes de fertilité, il faut commencer au plus vite. Dès ce soir serait l'idéal.
-Tu avais déjà tout planifié, n'est-ce pas ? Tu l'as convaincu avant même de m'en parler.
Elle se contenta de hocher la tête. Il se leva prêt à sortir, puis au dernier moment se retourna.
-Tu l'aimes ?
-Oui.
Elle n'avait même pas hésité une seconde.
-Si j'avais refusé, serais-tu tout de même allée le voir ?
-Non. J'avais une autre solution à te proposer, plus compliquée mais réalisable.
-Bon, je vais te laisser alors, termina-t-il à voix basse.
Mais avant qu'il n'ait pu quitter la pièce, une voix le coupa dans son élan.
- Briana n'a pas dit que tu pouvais partir.
Alistair se retourna pour faire face à son rival. Il hésitait entre l'étrangler ou lui coller son poing dans la figure, histoire de se débarrasser de son sourire narquois.
-Dois-je te rappeler que je suis roi à présent ? Je pourrais te faire exécuter pour crime de lèse-majesté.
-Oh pardonnez-moi votre Majesté, répondit-il sans en penser le moindre mot et toujours avec son sourire en coin.
Il observa l'elfe se déplacer lestement pour finalement s'arrêter devant lui. Confus, il se tourna vers sa femme cherchant dans ses yeux une réponse. Elle se contenta de lui sourire.
Du coin de l'œil il surveillait le moindre mouvement de l'assassin. Il avait toujours le pressentiment que celui-ci préparait un mauvais coup. Mais pour l'instant, il se permettait juste d'observer sa femme avec un peu trop de possessivité.
Briana se leva et alla sortir de sa réserve personnelle trois coupes et une flasque d'alcool qu'elle gardait pour les grandes occasions. Une fois les verres pleins, elle traversa souplement la pièce et une fois à leur hauteur, leur tendit chacun un verre. Alistair prit le sien mécaniquement et avala son contenu d'une seule traite. Le liquide lui brûla la gorge et il se mit à tousser, les larmes au bord des yeux. Il ne savait de quel type d'alcool il s'agissait, mais il était beaucoup plus fort de ce dont il avait l'habitude. Ce qui ne voulait pas dire grand-chose, puisqu'il n'était pas un grand consommateur de spiritueux : un verre de vin et il se mettait à rire le reste de la soirée.
Les ricanements de Zévran lui firent décoller les yeux du fond de son verre. Il redressa les épaules, le foudroyant du regard.
-Sa Majesté serait-elle un petit buveur ? questionna narquoisement l'elfe.
Piqué au vif, les mots sortirent de sa bouche avant qu'il n'ait pu se retenir.
-Pas du tout. Je tiens parfaitement bien l'alcool.
-Vraiment ? répliqua Zévran le sourcil haussé et le sourire en coin.
Pour prouver ses dires, Alistair se dirigea vers le meuble ou trônait la flasque, se servit généreusement et vida aussitôt sa coupe. Cette fois il ne toussa pas, même si l'alcool lui brûla une fois encore la gorge et qu'il eut l'impression que la pièce s'était considérablement réchauffée. Distraitement il nota que c'était peut-être grâce à son entraînement de Templier s'il n'était pas déjà à terre et il se félicita d'avoir mangé un copieux en-cas.
Alistair se tourna alors vers Zévran, légèrement instable sur ses pieds, souriant triomphalement.
-Je suis impressionné, je pensais que Sa Majesté se serait effondrée après son deuxième verre de vin.
Afin de faire disparaître l'expression moqueuse de l'elfe, Alistair marcha abruptement vers sa femme et l'embrassa fiévreusement, lui décollant au passage les pieds du sol. Puis il la reposa avec un petit sourire satisfait, narguant Zévran. Sur ce domaine, il était sûr de gagner. Du moins le pensait-il...
L'elfe nullement déconcerté se contenta d'attirer Briana à lui et de l'embrasser passionnément. Alistair observa soucieusement l'échange, il n'était pas sûr de sa décision. Arriverait-il à mettre suffisamment ses incertitudes de côté afin de permettre la survie du royaume ? Il avait déjà eu l'occasion de partager Briana, mais les circonstances avaient été différentes. Cette fois là, leur partenaire avait été une femme et il ne s'était pas senti menacé par elle. Alors qu'avec Zévran... Et il n'était pas sûr que tout soit à mettre sur le compte de l'alcool.
Une fois que Zévran eut relâché Briana, celle-ci s'éloigna d'eux vivement, la démarche raide. Puis elle se retourna, les foudroyant du regard. Oh, elle n'avait pas l'air contente. Alistair se demanda distraitement si c'était parce que l'elfe embrassait mal et se mit à ricaner.
-C'est malin, fulmina-t-elle contre l'elfe en pointant du doigt Alistair, il est complètement ivre ! Tu n'a pas pu t'empêcher de le provoquer et voilà le résultat !
-Ce n'est pas de ma faute s'il ne sait pas s'arrêter. Je ne lui ai pas mis le verre dans les mains.
-Quant à toi, l'apostropha-t-elle, quelle idée de marcher dans son jeu, tu sais très bien que tu ne tiens absolument pas l'alcool. Je te croyais suffisamment intelligent pour le laisser dire.
Oui il était suffisamment intelligent, mais l'elfe réveillait à chaque fois ses instincts primaires qui le faisaient agir, plutôt stupidement, au lieu de réfléchir. Ce n'était vraiment pas de sa faute. C'est ce qu'il essaya de dire, mais tout ce qui sortit de sa bouche fut un espèce de grognement. Et il se remit à ricaner.
Briana s'approcha de lui et l'aida à s'assoir sur leur lit.
-J'espère que tu as un remède sur toi Zévran, parce que sinon, le Créateur m'en soit témoin, je vous enverrai régler vos problèmes de mâles dominants dans le chenil. Je suis sûre que les mabaris seront heureux de vous arbitrer.
Il n'entendit, ni ne vit ce que l'assassin décida de faire mais il eut rapidement dans les mains une fiole dont Briana lui fit avaler le contenu de force. Il en sentit rapidement les effets et dut lutter pour rester éveillé tandis qu'elle le déshabillait. Puis elle l'allongea et il l'entraîna avec lui. Briana soupira mais se laissa faire et se serra contre lui. Il eut vaguement conscience que la pièce s'assombrissait, puis qu'un autre corps se glissait dans leur lit. Alistair sentit Briana se détacher de lui et qu'une jambe se posait par dessus la sienne.
Il eut la lointaine impression que la situation était anormale, mais le sommeil le gagna avant qu'il ne trouve pourquoi.
Auteur : kethry_raven
Jour/Thème : 30 novembre, fin de journée& thème du mois "à trois"
Fandom : dragon age
Personnage/couple : Alistair Theirin, Briana Theirin (PC humaine noble), Zévran Arainai
Rating : PG-13
Disclaimer : L'univers de Dragon Age appartient à Bioware, je ne fais que l'emprunter pour y jouer.
Participation au vote de fin de mois : oui
Note : Gros spoilers sur la fin d'Origins et de l'add-on Awakening. Par contre pour un non joueur, peut se lire comme une originale, il y a suffisamment d'explications pour comprendre le texte et son univers.
Alistair se déplaçait d'un pas vif le long des couloirs afin d'atteindre sa chambre, son refuge après une dure journée passée à écouter les Banns se plaindre et signer des papiers à tout va. Rien que de savoir que son épouse l'attendait lui fit accélérer le pas, pressé de pouvoir enfin se débarrasser des ses vêtements de cérémonie royaux, mais aussi de pouvoir enfin profiter d'un moment d'intimité avec Briana. Ils discuteraient des affaires du pays et elle lui apporterait ses conseils éclairés, puis ils parleraient de l'avancement de la reconstruction de l'Ordre des Gardes des Ombres et des dernières nouvelles de Fort Bastel.
Ne plus être un simple Garde des Ombres qui ne se préoccupait que du prochain combat contre les Engeances commençait à lui peser. Si on lui avait dit qu'un jour il regretterait de ne plus pouvoir se battre contre ces monstres corrompus, il leur aurait ri au nez.
Sur son passage, Alistair salua les gardes et les gens de service qu'il croisa.
Finalement arrivé, il eut la surprise de trouver Briana faisant les cent pas. Il remarqua le pli au milieu de son front qui n'apparaissait uniquement que lorsque celle-ci était vraiment préoccupée. La plupart du temps, son visage restait impassible. On aurait pu croire que rien ne la touchait, mais ce n'était pas le cas car Alistair savait que son épouse était en permanence maîtresse de ses émotions. Ce n'était pas pour rien qu'elle était une voleuse hors pair et même si parfois ses méthodes expéditives le gênaient, il ne pouvait nier qu'elles portaient leur fruit. Briana lui avait permis plus d'une fois d'obtenir la coopération « enthousiaste » des Banns. Ce qui n'était pas une mince affaire étant donné que chacun d'eux était persuadé de la préséance de ses exigences. On pouvait toujours compter sur les nobles de Férélden pour se plaindre sans arrêt.
Il remerciait chaque jour le Créateur de l'avoir mise sur son chemin.
Briana était tellement préoccupée qu'elle ne s'était toujours pas rendue compte de sa présence. Oh, cela ne présageait rien de bon.
- Envisagerais-tu de construire une tranchée dans notre chambre, mon aimée ?
Briana sursauta avant de se tourner vivement vers lui, la dague à la main. Lorsqu'elle le reconnut, son arme disparut promptement dans le pli de ses vêtements.
-Alistair ! Par le souffle du Créateur, tu m'as surprise. Soit plus prudent, la prochaine fois je risquerais de commettre un régicide avant de m'en rendre compte.
-Ce n'est pas de ma faute si tu commences sérieusement à te ramollir, répondit-il malicieusement, cette vie de palais commence à émousser tes réflexes. Si tu continues comme ça, bientôt je n'aurais plus besoin de me fatiguer pour te battre en duel.
-Vraiment ? répondit-elle narquoise, j'attends de voir ça !
Malgré son sourire apparent, il vit que ses piques ne l'avaient pas totalement détendue. Il s'approcha donc lentement d'elle et lui attrapa doucement le bras, puis porta sa main à ses lèvres l'effleurant d'un baiser. Elle frémit, mais ne se dérida pas pour autant.
-Alistair, il faut que nous parlions, annonça-t-elle gravement.
Il reconnaissait ce ton. C'était celui de la Reine Briana Theirin, celui qui impliquait qu'il n'allait pas aimer ce qui suivrait, qu'il contesterait vivement mais finirait par accepter à contre- cœur.
Il se souvint de la dernière fois où elle l'avait employé : lorsqu'elle avait décidé de nommer Nathaniel Howe responsable de l'Ordre des Gardes des Ombres en son absence, et lui avait plus ou moins rendu ses terres; cette nomination avait provoqué des vagues car Nathaniel était le fils de celui qui avait trahi et assassiné sa famille et avait tenté lui aussi de l'éliminer.
Mais Briana croyait à la vertu d'une seconde chance et ce n'était pas la première fois qu'elle épargnait et employait à son avantage quelqu'un qui avait essayé de l'abattre. Ce fichu elfe en était un parfait exemple.
Et puis ce n'était pas comme si l'avenir en tant que Garde des Ombres était attractif. Avec une chance sur trois de mourir durant la cérémonie de l'Union et une espérance de vie d'environ trente ans, peut-être avait-elle escompté sur le fait que Nathaniel meure rapidement.
Et même s'il ne l'avouerait jamais, au fond, il savait qu'elle avait fait les bons choix. Cependant sa générosité avait des limites : Howe et Loghain n'avaient pas eu cette chance. Pas de pardon pour le traître et le régicide.
Il soupira, se passant nerveusement la main sur la nuque. Puis décida qu'être assis serait une bonne idée.
-Dis-moi tout.
Briana prit une profonde inspiration avant de se lancer, le regardant droit dans les yeux :
-Tu sais que cela fait plus d'un an que nous sommes à la tête du royaume. Beaucoup de choses ont été détruites depuis la fin de l'Enclin et tout Férélden est en pleine reconstruction. Les temps sont durs pour notre peuple, ainsi que pour la noblesse. Nous sommes faibles et l'impératrice d'Orlais songe à en profiter. Ils souhaitent remettre Anora sur le trône ou tout du moins, sa lignée. Je pense qu'ils ne se gêneront pas pour la tuer elle et mon frère. De plus comme leur fils est trop jeune, n'importe qui pourrait assurer la régence. En étant Gardes des Ombres, nous pouvons disparaître à tout moment et laisser le trône vacant. Nous ne pouvons pas permettre cela. Nous devons consolider notre position sur le trône., elle reprit une inspiration, Alistair, il nous faut un héritier.
-Aurais-tu oublié qu'il est presque impossible pour deux Gardes des Ombres de concevoir ? Lorsqu'un seul des parents l'est, c'est déjà un miracle qu'un enfant naisse. Pour nous c'est impossible et un héritier, ça ne pousse pas sur les arbres.
Alistair n'était pas sûr de savoir où elle souhaitait mener cette conversation. Il était vrai que ces derniers temps, Eamon évoquait le sujet de moins en moins subtilement. Il avait même suggéré peut de temps auparavant de répudier Briana si elle ne concevait pas un héritier dans l'année. Il l'avait stoppé net, il était hors de question qu'il prenne quelqu'un d'autre à ses côtés. Avec le ton glacial qu'il avait employé, il s'était assuré qu'Eamon n'évoque plus jamais le sujet en sa présence.
Il appréciait que son père adoptif soit à ses côtés pour lui prodiguer des conseils avisés, mais pas comme conseiller marital. Il n'en n'avait cependant pas parlé à Briana, craignant qu'elle n'aille lui expliquer crûment sa façon de penser.
-Je le sais bien, mais j'ai une solution.
-Vraiment ? répondit-il le sourcil haussé et le bras croisés, je serais curieux de l'entendre. Serait-ce encore un sort ancien et inconnu ? Questionna-t-il, plaisantant à moitié.
Briana sursauta comme s'il l'avait giflé. Le rituel de Morrigan était encore un point sensible. Il la vit serrer les poings jusqu'à s'en faire blanchir les jointures. Elle prit une profonde inspiration avant de répondre :
-Absolument pas, mais il est vrai que comme cette fois-là, tu ne vas sûrement pas aimer.
-Pourquoi ne suis-je pas surpris ? soupira-t-il, de toute façon, après que tu aies suggéré de libérer Anora pour la marier à ton frère, je crois ne plus pouvoir être étonné. Explique-moi ton plan.
-J'ai demandé à Zévran de me faire un enfant, avoua-t-elle dans un souffle.
-Pardon ?!? répondit-il incrédule.
De toutes les solutions qui lui avaient vaguement traversé l'esprit, celle-ci n'en faisait certainement pas partie. Se rappelant une autre conversation plus d'un an auparavant, il sut qu'elle ne plaisantait pas. Finalement, il semblait qu'elle soit toujours capable de l'étonner.
-Pourquoi lui ? finit-il par demander.
Ce maudit elfe ne pouvait-il pas les laisser en paix ? Durant tout leur périple ensemble il n'avait pas arrêté d'essayer de corrompre tout le monde. Il s'était aussi étroitement attaché à Briana et l'observait plus attentivement que l'on s'y attendait d'un simple ami. Il l'avait même surpris une ou deux fois regardant dans sa direction.
Mais il se rendit compte qu'il ne refusait même pas l'éventualité, Briana le menait vraiment par le bout du nez. Pourtant, il aurait dû faire une scène, hurler, casser un ou deux meubles et pour finir claquer violemment la porte. Mais il savait déjà que cela ne servirait à rien. Elle avait raison, une fois de plus. Lorsque son demi-frère était mort sans héritier, le royaume avait sombré dans le chaos. Il avait fallu deux ans pour tout réorganiser et lui, le bâtard caché avait été promu roi.
Finalement s'était peut-être sa punition pour avoir conçu un enfant avec Morrigan.
-Pourrais-tu supporter qu'un inconnu pose ses mains sur moi ? l'interrogea-t-elle brusquement.
Alistair frémit à l'idée d'hommes sans visages caressant sa femme. Puis il remplaça ceux-ci par l'elfe et même si la jalousie le dévorait, il ne ressentait pas de colère.
-N'y avait-il vraiment personne d'autre ? questionna-t-il plaintivement.
Briana secoua négativement la tête.
-Non, commença-t-elle doucement, il est le candidat idéal. Suffisamment proche de nous pour n'en parler à quiconque et rester discret. De plus, s'il tient à être présent dans la vie de son enfant, il aura la possibilité de le faire sans que cela paraisse suspect.
-Tu en es sûre ? insista-t-il.
-Absolument, j'ai confiance en lui.
Son regard ne vacilla pas.
-Quand comptes-tu le voir ?
-Le plus tôt possible. Étant donné nos problèmes de fertilité, il faut commencer au plus vite. Dès ce soir serait l'idéal.
-Tu avais déjà tout planifié, n'est-ce pas ? Tu l'as convaincu avant même de m'en parler.
Elle se contenta de hocher la tête. Il se leva prêt à sortir, puis au dernier moment se retourna.
-Tu l'aimes ?
-Oui.
Elle n'avait même pas hésité une seconde.
-Si j'avais refusé, serais-tu tout de même allée le voir ?
-Non. J'avais une autre solution à te proposer, plus compliquée mais réalisable.
-Bon, je vais te laisser alors, termina-t-il à voix basse.
Mais avant qu'il n'ait pu quitter la pièce, une voix le coupa dans son élan.
- Briana n'a pas dit que tu pouvais partir.
Alistair se retourna pour faire face à son rival. Il hésitait entre l'étrangler ou lui coller son poing dans la figure, histoire de se débarrasser de son sourire narquois.
-Dois-je te rappeler que je suis roi à présent ? Je pourrais te faire exécuter pour crime de lèse-majesté.
-Oh pardonnez-moi votre Majesté, répondit-il sans en penser le moindre mot et toujours avec son sourire en coin.
Il observa l'elfe se déplacer lestement pour finalement s'arrêter devant lui. Confus, il se tourna vers sa femme cherchant dans ses yeux une réponse. Elle se contenta de lui sourire.
Du coin de l'œil il surveillait le moindre mouvement de l'assassin. Il avait toujours le pressentiment que celui-ci préparait un mauvais coup. Mais pour l'instant, il se permettait juste d'observer sa femme avec un peu trop de possessivité.
Briana se leva et alla sortir de sa réserve personnelle trois coupes et une flasque d'alcool qu'elle gardait pour les grandes occasions. Une fois les verres pleins, elle traversa souplement la pièce et une fois à leur hauteur, leur tendit chacun un verre. Alistair prit le sien mécaniquement et avala son contenu d'une seule traite. Le liquide lui brûla la gorge et il se mit à tousser, les larmes au bord des yeux. Il ne savait de quel type d'alcool il s'agissait, mais il était beaucoup plus fort de ce dont il avait l'habitude. Ce qui ne voulait pas dire grand-chose, puisqu'il n'était pas un grand consommateur de spiritueux : un verre de vin et il se mettait à rire le reste de la soirée.
Les ricanements de Zévran lui firent décoller les yeux du fond de son verre. Il redressa les épaules, le foudroyant du regard.
-Sa Majesté serait-elle un petit buveur ? questionna narquoisement l'elfe.
Piqué au vif, les mots sortirent de sa bouche avant qu'il n'ait pu se retenir.
-Pas du tout. Je tiens parfaitement bien l'alcool.
-Vraiment ? répliqua Zévran le sourcil haussé et le sourire en coin.
Pour prouver ses dires, Alistair se dirigea vers le meuble ou trônait la flasque, se servit généreusement et vida aussitôt sa coupe. Cette fois il ne toussa pas, même si l'alcool lui brûla une fois encore la gorge et qu'il eut l'impression que la pièce s'était considérablement réchauffée. Distraitement il nota que c'était peut-être grâce à son entraînement de Templier s'il n'était pas déjà à terre et il se félicita d'avoir mangé un copieux en-cas.
Alistair se tourna alors vers Zévran, légèrement instable sur ses pieds, souriant triomphalement.
-Je suis impressionné, je pensais que Sa Majesté se serait effondrée après son deuxième verre de vin.
Afin de faire disparaître l'expression moqueuse de l'elfe, Alistair marcha abruptement vers sa femme et l'embrassa fiévreusement, lui décollant au passage les pieds du sol. Puis il la reposa avec un petit sourire satisfait, narguant Zévran. Sur ce domaine, il était sûr de gagner. Du moins le pensait-il...
L'elfe nullement déconcerté se contenta d'attirer Briana à lui et de l'embrasser passionnément. Alistair observa soucieusement l'échange, il n'était pas sûr de sa décision. Arriverait-il à mettre suffisamment ses incertitudes de côté afin de permettre la survie du royaume ? Il avait déjà eu l'occasion de partager Briana, mais les circonstances avaient été différentes. Cette fois là, leur partenaire avait été une femme et il ne s'était pas senti menacé par elle. Alors qu'avec Zévran... Et il n'était pas sûr que tout soit à mettre sur le compte de l'alcool.
Une fois que Zévran eut relâché Briana, celle-ci s'éloigna d'eux vivement, la démarche raide. Puis elle se retourna, les foudroyant du regard. Oh, elle n'avait pas l'air contente. Alistair se demanda distraitement si c'était parce que l'elfe embrassait mal et se mit à ricaner.
-C'est malin, fulmina-t-elle contre l'elfe en pointant du doigt Alistair, il est complètement ivre ! Tu n'a pas pu t'empêcher de le provoquer et voilà le résultat !
-Ce n'est pas de ma faute s'il ne sait pas s'arrêter. Je ne lui ai pas mis le verre dans les mains.
-Quant à toi, l'apostropha-t-elle, quelle idée de marcher dans son jeu, tu sais très bien que tu ne tiens absolument pas l'alcool. Je te croyais suffisamment intelligent pour le laisser dire.
Oui il était suffisamment intelligent, mais l'elfe réveillait à chaque fois ses instincts primaires qui le faisaient agir, plutôt stupidement, au lieu de réfléchir. Ce n'était vraiment pas de sa faute. C'est ce qu'il essaya de dire, mais tout ce qui sortit de sa bouche fut un espèce de grognement. Et il se remit à ricaner.
Briana s'approcha de lui et l'aida à s'assoir sur leur lit.
-J'espère que tu as un remède sur toi Zévran, parce que sinon, le Créateur m'en soit témoin, je vous enverrai régler vos problèmes de mâles dominants dans le chenil. Je suis sûre que les mabaris seront heureux de vous arbitrer.
Il n'entendit, ni ne vit ce que l'assassin décida de faire mais il eut rapidement dans les mains une fiole dont Briana lui fit avaler le contenu de force. Il en sentit rapidement les effets et dut lutter pour rester éveillé tandis qu'elle le déshabillait. Puis elle l'allongea et il l'entraîna avec lui. Briana soupira mais se laissa faire et se serra contre lui. Il eut vaguement conscience que la pièce s'assombrissait, puis qu'un autre corps se glissait dans leur lit. Alistair sentit Briana se détacher de lui et qu'une jambe se posait par dessus la sienne.
Il eut la lointaine impression que la situation était anormale, mais le sommeil le gagna avant qu'il ne trouve pourquoi.