Dans la famille Londubat, je demande la grand-mère… encore^^

Jan 05, 2011 18:05

Un autre texte sur Augusta... Va falloir vous y habituer.
Désolé. Monomaniaque je suis, monomaniaque je reste.

Titre : Moustache d'encre et fumée imaginaire.
Auteur : jufachlo
Personnages: Lady Augusta
Disclaimer: Tout à elle… sauf la moustache^^
Rating : PG
Nombre de mots: 830
Note: Ecrit pour le défi "Nid d'amour" de hp_het_fr (enfin, écrit un peu avant, mais il collait tellement bien avec la demande)



Mes pieds nus s'enfoncent, happés par le riche tapis de son bureau. La laine est d'un bordeaux sombre. La teinte exacte du verre de Grenache noir qu'il aimait boire près du feu.
Son grand fauteuil de cuir fauve me tend les bras. Le haut dossier garde encore l'empreinte de son dos. Les accoudoirs ont été lustrés par les manches de ses robes. Il y a une tâche d'encre noire sur celui de droite. Je veux qu'elle me soit destinée, le fantôme d'un mot suspendu un instant et échappé de la plume qui m'écrivait.

Je m'assieds.

Aucune trace de poussière sur le bureau de noyer. L'encrier est plein, la plume qui y est plongée frémit dans le courant d'air qui file de la fenêtre ouverte. Près du chandelier de bronze posé dans l'angle gauche, une pile de parchemins attend encore qu'il rentre enfin et se décide à la noircir de nouvelles pour amis ou d'ordres pour les banquiers.
Je passe mes doigts sur le sous-main fait du même cuir que le fauteuil. J'effleure le minuscule prénom qu'un garçon de cinq ans, vandale en culotte courte, y avait inscrit en douce. "Fanck". Le "R" a fait les frais de la précipitation de l'auteur. Un sort protecteur conserve les lettres tordues telles qu'au premier jour du méfait.

Du graffiti, mes yeux passent aux photos où, dans des cadres ornés, une famille heureuse parcourt les allées du manoir couvertes de feuilles rousses, puis change de cadre et de décor pour aller manger des biscuits au gingembre sur la pelouse verte. Le petit garçon lassé des biscuits s'élance vers un nouveau cadre dans lequel il lance une boule de neige sur un chapeau hors de prix, pendant que son père rit. Ils disparaissent du paysage enneigé et je les retrouve un peu plus loin la bouche tâchée de framboise, la femme s'échinant à la leur nettoyer avec un mouchoir de dentelle. Face à leurs joies de papier glacé, je sens un vague sourire me monter aux lèvres. Et il faut un peu de temps pour que mes yeux acceptent de les quitter et de continuer le chemin des souvenirs sur le bureau.

Près des photos, un coffret de bois sombre. Sur son couvercle, des entrelacs de marqueteries dessinent le blason des Londubat. Le fermoir ciselé accroche la pulpe de mes doigts et grince un peu lorsque je le fait pivoter. Et quand j'ouvre la cassette, l'odeur du tabac vient me cajoler. Une douzaine de cigares y sont parfaitement rangés. Je passe mes doigts sur leurs bagues dorées. Je fais mine de m'y connaître, d'hésiter. J'en caresse un, puis un autre, et je me décide finalement pour un troisième, que je sors pour le faire rouler entre mes doigts.
Je l'ai vu faire ces gestes mille fois, s'arrêtant en plein milieu d'une lettre ou d'une conversation pour attirer à lui le coffret de bois. Caresse, hésitation, décision. Petite série d'habitudes parfaitement réglée. Une fois le cigare sorti de sa boite, il le humait, le faisait rouler entre ses doigts, le humait à nouveau avant de le glisser entre ses lèvres. Là, il prenait la pose, se regardant du coin de l'œil dans le miroir vénitien ornant la cheminée, jusqu'à ce que sa propre image le fasse tomber en extase: "Ah! Décidément, cette drogue moldue a une classe folle. Le cigare me va comme un gant en cuir de licorne".
Une fois ce fait énoncé, il rangeait le si fabuleux cigare dans son coffret, et retournait à ses affaires. Il ne l'allumait jamais. La seule et unique fois où, en compagnie d'un ami d'enfance, il s'était laissé aller à fumer l'un de ses havanes, son acolyte et lui n'avaient réussi qu'à tousser jusqu'à s'en retourner les poumons avant d'être pris de nausées qu'ils décrivirent comme insoutenables. Cela lui passa l'envie de faire des signaux de fumées à la manière moldue, mais pas de la fascination pour le geste et l'objet. Aussi, se contentait-il de faire le mime, jouant comme un enfant s'amuse à faire semblant.

Et maintenant qu'il n'est plus là, c'est mon tour. Et je me fais réplique de mon copieur de fumeur. Je prends la pose, je m'observe, et ah, moi aussi je trouve cette drogue moldue bien seyante! Alors je le dis à mon reflet d'une voix sourde que j'étire dans les graves pour y chercher les intonations qu'avait sa voix . Parfois même, je prends un instant pour me dessiner avec la plume une moustache d'encre si semblable à la sienne. Ces jours là, ma voix se fait plus grave encore, et l'odeur du tabac me semble plus forte.

Et une fois ma tirade déclamée, comme lui, je range le cigare, et je referme le coffret avant de le remettre en place.
Je me lève et me dirige vers la porte. En la fermant je mets fin à ma petite visite à mon époux.
Demain, c'est à mon fils que je rendrai visite.
Mais demain seulement. A chaque jour suffit sa peine.

one-shot, augusta, the l world

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