Voilà, j'étais de Murder-Party ce week-end et entre deux meurtres, trois vols, une apparition de fantôme et beaucoup d'autres choses je n'ai pas eu le temps de poster la suite.
Pour me faire pardonner un petit extra après les sept premiers chapitres qui constituent la première partie de cette fic.
Chapitre 5 - Invasion
Septembre 2009
Ce fut d’abord, discrètement, un Lupin. Théodore Lupin.
Severus avait entendu dire que Potter en était le parrain, et c’est sans surprise que le gamin atterrit à Gryffondor.
Merlin soit loué, il n’avait pas hérité de la lycanthropie de son père. Les gènes des Tonks et particulièrement la capacité de se colorer les cheveux dans les couleurs le plus criardes qui soient semblaient avoir dominé.
Le premier Weasley débarqua deux années plus tard. Une Weasley, en l’occurrence, celle-là même dont il avait lu l’avis de naissance quelques temps auparavant… onze ans… la mort était une condition raisonnable à l’avantage de ne pas vieillir, musa-t-il.
Gryffondor. La fillette avait une part de sang de Vélane, se rappela-t-il en observant Lupin, en Troisième Année, la suivre partout comme un petit chien.
Les cinq années suivantes, il ne se donna même plus la peine de se souvenir de tous les prénoms des rouquins qui se multipliaient dans son école. Il ricana un peu quand Molly Junior Weasley atterrit à Serdaigle. Serpentard aurait été encore plus jouissif, mais c’était toujours mieux que Poufsouffle.
Puis James Sirius Potter pénétra comme un conquérant dans la Grande Salle, et Severus le détesta immédiatement. La réincarnation existait, décida-t-il en observant le portrait vivant d’un autre James Potter, et elle avait décidé de s’en payer une bonne tranche à ses dépends.
Le Choixpeau envoya Potter v 3.1 à Gryffondor sans hésiter, où le morveux commença sans attendre à former sa petite cour. Le soir, Severus se retrouva à réviser ses meilleurs sortilèges de Mangemort.
-- Vous ne pouvez pas tuer un élève, remarqua Sir Nicholas quelques jours après.
Severus se dégonfla un peu. Il pensait avoir été plus discret dans ses préparatifs.
-- Un problème ? demanda Tesla avec curiosité en lui rendant visite quelques jours après avoir reçu sa lettre.
-- Humph, dit Severus.
-- Oh. Un gros problème, alors.
-- Un fantôme, déclara Severus avec un sourire torve.
Le problème, c’était que le gamin ne se contentait pas de ressembler à son grand-père, il se comportait comme lui. Et Severus supportait en grinçant des dents les petites blagues à la limite de la cruauté que Gryffondors et Serpentards commencèrent à s’échanger.
Puis un jour, un peu après la nouvelle année, Potter traita un petit Serpentard de Mangemort devant le reste de l’école et Severus mit de côté son orgueil, sa partialité et son adolescence pourrie pour écrire à Harry Potter.
Il écrivit d’une traite et tâcha de ne pas se rappeler ce qu’il avait exactement écrit - des choses comme « mis dix ans à ce que la maison de Serpentard soit à nouveau respectée » et « d’une rivalité amicale à une exclusion brutale qu’ils ne comprennent même pas » et « petit con prétentieux » et « responsabilité » et « considèrerait comme une preuve d’amitié ».
Potter père débarqua le lendemain, s’enferma dans une classe avec son rejeton, et Severus ne connut jamais les mots qui furent échangés mais Potter fils en ressortit en larmes et alla directement s’excuser auprès de sa victime.
-- Merci, marmonna-t-il en direction de son ancien élève.
Potter fit un geste embarrassé.
-- Merci à vous, répondit-il sur le même ton.
La fréquence et l’intensité des mauvais coups entre les deux maisons se calmèrent notablement après cet épisode. La présence de Potter junior continua à lui hérisser le poil, mais il se vengea discrètement en allant le hanter deux ou cinq fois.
Les mois suivants se déroulèrent sans évènements marquants, sans retours de Lords Noirs, invasions de Basiliques ou visites d’évadés d’Azkaban. Severus commençait à souffler quand une délégation de Sixième, Septième et Huitième Année vint bousculer sa tranquillité.
-- Des modules de Magie Noire en classe prépa ? répéta-t-il lentement.
De l’autre côté du bureau, Lupin, porte-parole désigné, se tortilla légèrement.
-- Durmstang les a intégrés dans son cursus, avança-t-il.
-- Ce qui est tout à leur honneur mais pourquoi faire ? demanda Severus d’une voix tranchante.
-- Il y a plusieurs formations qui nécessitent des connaissances en magie noire, insista le jeune homme. Celles d’Auror et la toute nouvelle d’InterSor, mais aussi les nouveaux programmes des maîtrises de Potions et de Sortilèges.
-- Des connaissances qui seront enseignées une fois que vous serez adultes, après l’école, répliqua Severus en sentant qu’il perdait du terrain. (Et pour être honnête, il était à 100% pour l’idée. Mais le Ministère ne le serait pas. Autant que la pression vienne des élèves.)
-- Le programme de classe préparatoire fait partie des études supérieures, protesta Lupin. Et tous les élèves sont majeurs, du moins en fin d’année. Bien entendu, ajouta-t-il en ouvrant de grands yeux, il faudrait des enseignants qualifiés.
-- N’essayez pas votre contre-transfert psychologique de pacotille avec moi. Je vais consulter les responsables des formations que vous m’avez citées et le directeur de Durmstang. S’ils me confirment que des notions en Magie Noire permettent une compréhension plus rapide des enseignements supérieurs, je soumettrai une proposition au Ministère. (Il regarda Lupin.) Je crains cependant qu’il ne soit trop tard pour votre promotion, monsieur Lupin.
-- Nous en avons hélas conscience, monsieur, répondit joyeusement le jeune homme. Mais nous avons pensé que notre appui pourrait être utile.
-- Mmh. Vous pouvez sortir.
Les élèves le remercièrent poliment et Victoire Weasley pelota les fesses de Lupin en franchissant la porte.
Il passa les derniers mois de cours à tisser sa toile. Pas question cette fois de passer outre l’accord officiel du Ministère. Severus était fermement déterminé : comme l’avait dit Lupin, aucun mineur n’était en jeu, et il préférait que ses élèves soient encadrés pour pratiquer ce type de magie plutôt que de les laisser fouiller la Bibliothèque et s’exercer dans les couloirs la nuit. Il fit remettre en état une aile entière du château qui avait été laissée à l’abandon après la bataille, assez éloignée des autres pour pouvoir y ajouter certaines protections nécessaires. Il monta un programme soigneux avec l’aide de ses quatre enseignants principaux. Il agrémenta la réserve de Poppy de nouvelles potions qui auraient - presque - pu ressusciter les morts.
Le 1er juillet, il attaqua.
Il attaqua discrètement. Il profita de l’absence de certains membres du Ministère, partis se dorer la pilule quelque part de l’autre côté du globe, pour présenter le projet de ses élèves et défendre les arguments de ses élèves et faire miroiter ce que gagneraient ses élèves et la réputation de l’enseignement britannique à la mise en place du cursus.
Son nouveau programme fut validé le 10 août.
Presque trop facile, conclut-il en écoutant d’une oreille la Beuglante de Potter, récemment promu Directeur du service des Aurors et rentré de Tahiti le 12 août.
La rentrée ajouta trois nouveaux noms intéressants à la liste de ses élèves.
Rose Weasley. Peut-être devenait-il urgent de changer les couleurs de Gryffondor. Rouge et orange, ou orange et or, par exemple.
Albus Potter. Albus Severus Potter. Severus soupira avec accablement.
Scorpius Malfoy. Ah. Draco s’était fait discret pendant quelques années avant de se lancer sur la scène politique. Peut-être allait-il se présenter au Conseil d’Administration ?
Il reposa le parchemin sur son bureau. Il était parvenu à tenir bon face à ces deux imbéciles de Potter et Malfoy. Qui voudrait de filleuls nommés Albus et Scorpius ?
Mais ce fut avec curiosité qu’il observa les deux garçons le jour de la rentrée.
Poudlard était à présent entièrement restauré, empli d’élèves qui n’avaient aucun souvenir du retour de Voldemort. La Grande Salle débordait de bruits, de lumières, des couleurs vives des uniformes et des visages radieux des morv - enfants heureux de se retrouver. Les Premières Années, s’avançant timidement dans l’allée centrale, regardaient autour d’eux avec ébahissement, tandis que leurs aînés chahutaient en attendant la chanson du Choixpeau. Les enseignants étaient aussi excités que leurs élèves, constata Severus, et c’était presque comme si l’horrible guerre ne s’était jamais déroulée.
Sinistra réclama le silence, et la cérémonie de répartition commença.
Après une vingtaine de noms, celui de Scorpius Malfoy fut prononcé. Le garçon - mince, pâle, blond, droit, et Severus se fit une note mentale d’étudier l’influence de la magie sur la génétique humaine - s’avança sans hésiter jusqu’au tabouret et plaça le couvre-chef sur sa petite tête. Il fallut deux dixièmes de seconde au Choixpeau pour l’envoyer à Serpentard. L’assistance applaudit, peu surprise, puis se concentra sur le candidat suivant.
Severus s’était attendu à une seconde version de la calamité qui lui était tombée dessus l’année précédente, ou à une autre tête rousse - sa mère était une Weasley, après tout - mais Albus Potter ne ressemblait pas exactement à son frère ou ses cousins. D’abord, il était calme. Severus n’avait jamais vu un Potter ou un Weasley calme. Peut-être était-il simplement intimidé, songea-t-il en sachant qu’il ne faisait que nier l’évidence. Non, un Potter calme. Son système de valeur s’en trouva légèrement bousculé. Ensuite, de légers détails différaient : les cheveux, bien que bruns, légèrement bouclés ; son dos bien droit alors que son père et son frère avaient toujours eu une silhouette avachie ; son expression curieuse au lieu d’être impétueuse. Seuls les yeux verts restaient les mêmes que sa grand-mère et son père, mais en amandes, et Severus resta un long moment à les fixer. Puis le garçon lui tourna le dos et s’assit à son tour.
Le Choixpeau resta silencieux plusieurs minutes, au point que l’assemblée commença à chuchoter, d’abord avec discrétion, puis plus bruyamment. Puis il lâcha un…
-- Serpentard !
… et un grand silence se fit.
Albus Potter se releva et regarda autour de lui, un peu pâle et les yeux écarquillés, et Severus se reprit et commença à applaudir, immédiatement suivi de ses collègues. Les élèves les imitèrent et la tablée de Serpentard se mit alors à pousser de véritables rugissements de victoire. Severus ricana intérieurement en contemplant le visage de James Potter, complètement défait, et approuva quand Scorpius Malfoy fit signe à Potter de s’asseoir à côté de lui.
Le reste de la répartition se passa dans une ambiance qui manquait sérieusement de concentration. Rose Weasley termina, sans surprise cette fois, à Gryffondor.
Puis Severus se redressa et, dans le silence qui suivit, prononça son rapide discours de début d’année. Albus - Dumbledore - l’avait bien compris : inutile de chercher à faire entrer des règlements dans l’esprit d’adolescents affamés. Les ventres commençaient à gronder autour de lui.
-- Je vous souhaite un bon retour à Poudlard, commença-t-il d’un ton neutre, et la bienvenue aux nouveaux d’entre vous. Les règles de sécurité restent les mêmes que l’année dernière. La liste des activités extrascolaires sera affichée dans les salles communes de vos maisons respectives. Le programme de l’Ecole s’agrémente cette année d’une initiation à la Magie Noire… (Il fit une pause tandis que les inconscients chuchotaient avec excitation.)… qui sera bien entendu réservée aux élèves des classes préparatoires ayant réussi la totalité de leurs NEWTs. Je vous souhaiterais bien une agréable année, continua-t-il d’un ton sarcastique, mais je sais que la majorité d’entre vous préfèrera passer son temps à rêver, flirter et cancaner plutôt qu’à véritablement étudier. Tâchez donc au moins de survivre, conclut-il en frappant dans ses mains.
Il y eut quelques rires et les élèves se jetèrent sur les plats qui venaient d’apparaître sur les tables.
Un Potter à Serpentard, cogita-t-il tandis que le reste de l’assemblée se repaissait enfin. Et bien, et bien. Certaines personnes allaient en faire des attaques.
Une fois l’excitation retombée, les marmots couchés et la paperasse bouclée, il s’accorda une petite ronde dans les couloirs déserts de son château. Les bâtiments étaient aussi silencieux qu’ils l’avaient été durant l’été, mais il distinguait au-delà la vibration sourde des trois cents cœurs qui l’habitaient à présent, le souffle des trois cents respirations qui le hantaient. Il sourit. Avec un peu de chance, il terminerait cette journée parfaite en attrapant deux élèves impatients de se retrouver après les vacances. Ou quelque Première Année aventureux.
Bingo, conclut-il en apercevant quelques instants plus tard une petite silhouette qui trottinait dans les cachots. Un Serpentard, dommage. Mais bon, un Potter tout de même.
-- M. Potter, prononça-t-il lentement, glacialement, en flottant dans sa direction. (Le gamin sursauta et leva vers lui de grands yeux écarquillés.) Je suis extrêmement désappointé de constater qu’il ne vous aura fallu que quelques heures pour déroger au règlement et faire perdre ses premiers points à votre nouvelle maison.
A sa décharge, l’enfant ne chercha pas à se défendre - comme son père - et ne prit pas une attitude bravache - comme son frère. Il n’éclata pas non plus en sanglots, ce qui était plutôt impressionnant pour un enfant de onze ans confronté au fantôme furieux de son directeur en plein milieu de la nuit après une journée épuisante. Il se contenta de baisser la tête et de marmonner quelque chose.
-- Plus haut, Potter.
-- Je voulais juste voir la Chambre des Secrets.
Ah. Il existait donc un brin de bravoure stupide et inconsidéré chez le cadet des Potter. Severus se sentit légèrement rassuré.
-- Et vous considérez que c’est une raison suffisante pour enfreindre le couvre-feu ?
-- Non Monsieur, répondit docilement Potter.
Severus hésita, torturé entre son instinct et ses années de Chef de Maison de Serpentard. Finalement, il décida qu’il était peut-être plus intéressant de laisser un des Potter en paix. James Potter en serait sans doute doublement outré, et après tout il avait un - non, deux réputations à entretenir. Celle d’un enfoiré favorisant outrageusement son ancienne maison, et celle d’un homme capable de mettre de côté les anciennes inimitiés.
- Retournez à votre dortoir, dit-il d’un ton sec.
Potter lui jeta un regard légèrement surpris, puis pensif. Calculateur, s’il n’avait pas seulement eu onze ans.
- Professeur Snape…
- Encore là, Potter ?
- James - mon frère - dit que vous lui élevez toujours des points quand il désobéit au règlement. Monsieur.
Le marmot le regardait avec de grands yeux innocents. Severus avait trop d’expérience pour tomber dans le panneau.
- Y a-t-il quelque chose que vous n’avez pas compris dans mes paroles, Potter ?
- Nonm’sieur, répondit précipitamment le garçon.
Quelques secondes de silence.
- J’ai bien peur de m’être perdu, ajouta-t-il d’une petite voix.
Severus ferma les yeux, soupira intérieurement, puis lança un sec « suivez-moi » avant de s’éloigner sans regarder derrière lui. Ce ne fut qu’au bout de quelques pas qu’il réalisa que, peut-être, le gamin se jouait de lui. Non. Il imaginait des choses.
- Merci, monsieur, dit poliment Potter.
Calme et bien élevé.
- Nous ferons peut-être quelque chose de vous, maugréa-t-il. Si vous arrêtez de vous promener dans les couloirs la nuit.
- Est-ce que ce serait un problème si je ne me faisais pas prendre ? demanda sérieusement l’enfant.
Severus stoppa et se retourna, ses yeux lançant des flammes. Potter penchait curieusement la tête sur le côté.
- Mon père m’a dit que vous vous promeniez toujours la nuit dans le château quand vous étiez jeune, dit-il. Et le professeur Dumbledore aussi. Il dit que vous avez certainement enfreint plus de règlements que lui.
Il fallait qu’il arrête d’ouvrir son excellent whisky quand Potter passait au château, décida-t-il.
- Votre père dit beaucoup trop de choses. Et la prochaine fois que je vous surprendrai dans les couloirs, vous n’aurez plus rien à envier à votre frère, gronda-t-il.
Potter junior le deuxième déglutit, et hocha la tête.
- James dit que vous le haïssez, prononça-t-il vingt mètres plus loin.
Oh, doux Merlin.
- Je ne le déteste pas. Votre frère se conduit comme un abruti et mérite d’être traité et corrigé comme tel.
L’enfant gloussa.
- Vous n’avez pas le droit d’appeler vos élèves comme ça.
- Je n’ai jamais dit qu’il en était un.
- Oh.
- Je pense que vous êtes arrivé, monsieur Potter, coupa Snape en s’arrêtant devant l’entrée de la salle commune de Serpentard.
Le visage du garçon se rembrunit légèrement, et il inspira profondément.
- Monsieur Potter, s’entendit dire Severus, même si la décision du Choixpeau fut pour le moins… surprenante, je peux vous assurer qu’il n’y a aucune honte à se retrouver dans cette maison.
- Je sais, murmura tranquillement le garçon.
Planté devant la tapisserie, il avait terriblement petit.
- Professeur Snape ? dit-il d’une petite voix.
- M. Potter ?
L’enfant hésita, ouvrit et referma la bouche plusieurs fois. Severus eut pitié de lui - et c’était un Serpentard après tout.
- Bien que M. Inami soit votre directeur de maison, vous pouvez venir me voir dans mon bureau si vous avez un problème, dit-il d’une voix sèche. L’entrée se situe au niveau de la gargouille du deuxième étage, et le mot de passe est ‘catalyse’. N’en abusez cependant pas.
Le garçon répéta le mot trois fois, puis hocha la tête et lui fit un grand sourire.
- M. Potter, l’arrêta Severus alors qu’il tendait la main vers la tenture. Pardonnez ma curiosité, mais demain, allez-vous vous asseoir avec votre frère et les Gryffondors ou allez-vous rester avec Malfoy et les autres membres de votre maison ?
L’enfant considéra la question, puis son visage s’éclaira à nouveau.
- Je pense que je vais me lever plus tôt, arriver avant James et le laisser choisir, dit-il joyeusement.
Severus ne gloussa certainement pas, mais il supposa, en avisant l’air ravi de Potter, qu’il avait dû laisser transparaître son amusement.
A suivre.