Écrit le 22 juin 2008 pour
marathon_promptPrompt lancé par
neyarchess : « Je ne suis pas l'objet de tes fantasmes. » « Mon objet sexuel alors ? »
Demain est un jour que je regretterai
Adrien pouvait sentir la respiration chaude et régulière de Marc dans son cou, son bras lourd en travers de son torse, la fermeté de sa bouche au contact de son épaule. Plus éveillé que jamais, Adrien s’extirpa de l’étreinte et des draps. La pièce n’était pas plongée dans une obscurité complète et ses yeux s’étaient depuis longtemps accoutumés au noir ; il retrouva sans grande difficulté ses vêtements. Il enfila rapidement son caleçon, ne se préoccupa pas du reste, et rentra en catimini chez lui. Il referma avec précaution les portes derrière lui.
Leurs appartements respectifs n’en avaient formé qu’un à une époque, avant que leur propriétaire ne juge plus intéressant de le scinder en deux puis de le louer. Ce n’était pas la population estudiantine qui manquait. Cette dernière était peu exigeante à partir du moment où elle avait la chance de trouver un habitat libre et pas trop cher, et l’immeuble était bien situé. (Adrien n’était plus étudiant mais son emploi dans une pizzeria ne lui rapportait pas des mille et des cents.) Dans le cas de Marc et Adrien, dire qu’ils étaient voisins était un euphémisme ; ils habitaient pratiquement ensemble. La large porte de bois de l’ancien appartement avait été conservée et s’ouvrait sur un sas où se trouvaient deux simples portes intérieures auxquelles on avait ajouté une serrure. Même peu vêtu, Adrien n’avait donc pas à s’inquiéter d’être vu, il pouvait passer en toute discrétion.
Rentré chez lui, le cœur un peu nauséeux, révolté, Adrien s’effondra sur son lit. De l’autre côté du mur, fin comme du papier à cigarette, Marc dormait sans avoir conscience qu’il se réveillerait seul. Si Adrien tendait fort l’oreille et parvenait à faire abstraction des bruits de la rue, peut-être pourrait-il l’entendre respirer.
Il n’en avait aucune envie.
Il se glissa sans ses draps et ferma les yeux.
Il avait couché avec Marc. Presque couché avec Marc. Il n’y avait pas eu pénétration mais pour la différence que cela faisait… Tout ceci était ridicule et à la fin, c’était lui qui allait en subir les conséquences. Marc n’était pas homosexuel. Adrien, et la tête de son lit séparée de celle de Marc par un tout petit mur, était bien placé pour le savoir. Marc était simplement curieux. Tout à faire le genre de type à vouloir tenter de nouvelles expériences, pour le peu qu’Adrien connaissait de lui. Il ne comprenait pas encore très bien comment les choses avaient pu déraper à ce point. Il savait, pourtant. Que Marc était hétéro. Qu’il lui faisait du rentre dedans. Qu’il était hors de question qu’Adrien accepte ses avances.
Le dîner n’avait engagé à rien, d’autant qu’il avait cru qu’il s’agirait d’une sorte de buffet entre voisins, sorte de continuation à la séance d’observation de l’éclipse que Marc, féru d’astronomie, avait organisé dans leur immeuble. Quand il avait réalisé qu’ils ne seraient que tous les deux… eh bien, il aurait été délicat de rebrousser chemin. Ce n’était qu’un repas entre voisins, rien de plus. Jusqu’à ce qu’après le dessert, Marc se mette à l’embrasser.
Marc ne lui avait pas vraiment forcé la main, Adrien s’était montré faible, voilà tout. Marc était agréable à regarder, les muscles qui se dessinaient sous ses vêtements donnaient envie de se passer la langue sur les lèvres. Marc embrassait bien, pour un hétéro. Il n’avait pas eu peur de mettre les mains là où il fallait. À croire qu’il avait fait sa toute sa vie. Il était devenu un peu maladroit lorsque les choses s’étaient faites plus sérieuses mais à ce moment-là, Adrien ne pensait déjà plus qu’à l’encourager. Ils n’avaient pas été au bout mais ils en avaient fait assez pour que le corps d’Adrien s’en souvienne et en demande encore. Et davantage.
Tout ceci était ridicule, vraiment. Il avait presque couché avec son voisin hétéro. Qu’est-ce qu’il allait faire, à présent ? Repousser Marc, bien sûr, si celui-ci revenait à la charge, comme il le ferait sûrement si Adrien avait un tant soit peu cerné le personnage. Il n’avait pas encore tout expérimenté après tout et il ne semblait pas le genre de personne à s’arrêter en si bon chemin. C’était la seule solution, la seule chance de pouvoir rattraper l’entente cordiale et distancée à maintenir entre voisins. Oui, c’était la seule chose à faire.
Demain, il le lui dirait. Demain.
Fin
Autre information :
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post récapitulatif et explicatif de l'univers des Langaret.