le 8 juin 2005, là.

Jun 09, 2005 00:03

La résolution de ne plus poster pour ne rien dire n'en était qu'à moitié une.
Mais là, là, je ne peux pas. Je ne peux pas.
C'est ridicule. Cette journée, ces dernières 24h sont tout simplement ahurissantes.
Pour moi, simplement. Il n'y a rien de grandiose, en fait. Presque.


Dans la nuit, on termine la soirée chez une nana du quartier.
Sa copine moche me branche. Ce petit jeu dure depuis trois heures.
Je finis par agir, pour en finir et... elle évite.
Mais qu'est ce que je fais là, putain ?
Ridicule, pathétique. C'est stupide, j'ai envie d'hurler.
C'est à chier, juste à chier.
Je me force à jouer le jeu pourtant, à la prendre dans mes bras,
alors que j'ai juste envie d'hurler qu'elle est conne et moche,
que j'aurai tant honte de la baiser, alors même que c'est uniquement
le contact physique, cette putain de tendresse qui me manque, c'est tout.
Elle fuit, revient.
Franck, viens, on s'en va. On s'en va.
Tirons nous, bordel ! voulais je tant dire.

Couché 6h. Me réveille tous les quarts d'heure.
Le plombier doit passer. Même pas pour mes chiottes,
même pas pour l'eau froide avec laquelle on se douche
depuis deux semaines. Juste pour les infiltrations de la voisine.
Les gros bourrus passent - 8h15. Obligé de réveiller
Franck. Putain. Ils regardent pour mes trucs, avec une saloperie
d'hypocrisie "Mais on peut rien faire sans l'accord du syndic !"
Te casses pas, j'ai compris, ton boss t'a mis au parfum. Enfoiré.
Cette ordure de bailleur est un mafieux. Quasi en procès avec lui.

Mal recouché, mal réveillé.
Mon rencard de 11h30. Mon producteur. Les Halles, au Père Tranquille.
The Big Day.
Le jour où...
Le jour où mon producteur doit m'annoncer qu'il a kiffé le traitement
du film qu'on projette de faire ensemble. On cherche "la" bonne idée
depuis des mois. Et c'est aujourd'hui qu'il doit enfin valider cette
merde. Oui, ton traitement se tient, j'adore, signons le contrat, tu
es enfin scénariste, tu vas être payé pour ça, tu as fait du bon boulot,
ton film va cartonner, on s'est enfin compris sur toute la ligne, tu
vas réaliser ton premier long, Ben, c'est la réalité, ce n'est plus du
délire d'ado, c'est la réalité. Au Père Tranquille.
Non.
NOn.
Juste non.
Ce n'est pas ça. Et c'est ça la réalité. La fille de mes rêves, mon cul.
"C'est très bon, c'est sûr, mais c'est "too much". L'idée est forte, mais
tu vas trop loin, on arrivera jamais à vendre ce film là. Va plutôt vers
quelque chose de plus sobre, de drôle et de touchant, mais sans ces scènes
là.." ETC ETC ETC ETC. etc.
etc.
etc.
Remets tout en cause.
Il n'y a rien de simple.
Tu pensais avoir agripper un bon appui.
Ce n'était qu'un caillou branlant.
..
On se comprend pas. Je lui ponds des trucs bien, il comprend pas.
Il m'aime bien et il veut bosser avec moi, mais il comprend pas ce que sont
mon univers et mon style. Il me repropose son "slasher movie" si on ne trouve
rien sur mon idée. Bref. Des portes de sortie. Mon premier long, un slasher.
Merde.

Chez moi, des doutes, des pates, des photos, une branlette, checker six fois
mes mails et rien. Rien de nulle part. Pas le Pérou, pas Paris, juste Londres.
C'est déjà ça.
J'appelle pour le ballon. L'agence, ces escrocs.
J'explique tranquillement : le plombier est passé, il faut tout changer, il a dit,
alors maintenant, quand l'envoyez vous pour moi, pour mes chiottes et le ballon.
Attendez, je vous passe M. N--.
Oh putain.
La tension monte. Rien que de savoir que je vais parler à cet enfoiré qui me prend
pour un con et qui cherche à m'enculer depuis des mois, je me crispe, fais l'appart
en long et en large.
Mais c'est la fille qui reprend.
Il ne peut pas. En fait, votre solde est de 1200 euros, donc tant que vous n'aurez
pas payer, on ne peut rien faire...
Vous voulez un procès, c'est ça ?! dis je. Elle comprend pas, ou plutôt très bien.
Je commence à la pourrir, à m'énerver, la fille est dépassée. Exécrable.
J'ai juste envie de casser la gueule à ce lâche qui n'est même pas capable d'affronter
ses ennemis. Même au téléphone. Salopard. Mon poing dans la gueule.
Vous rendez compte que c'est du chantage ? Salopard.
Pas énervé comme ça depuis des lustres. Rage noire.
Ca fait des mois que cette sale histoire traîne. Putain de putain !

Rien à foutre de me laver à l'eau froide.




Excédé, la rue à nouveau.
La Poste, trop de monde. Je file.
Direct au Royal Mont Cenis.
Soleil tape. On parle d'hier soir avec Sâïd.
Gilles et Franck arrivent. Diabolos Menthe.
On va éviter les bières.
Dur de tenir plus de quatre jours d'affilée sans alcool.
Me fait peur. Putain, alcoolique.
Les deux nanas d'hier soir arrivent. Chier.
L'autre vient nous dire bonjour.
Sourire forcé. On insiste pas, elle non plus en fait.
C'est très bien, c'est très bien. Voilà, voilà.

Plus tard, les mêmes, des courses. Monop.
Une fille impressionnante. Apprêtée, singulière.
Elle me plaît. Les autres me poussent. Vas-y.
On s'arrange, le temps de ranger les courses.
Je crois à un regard.
On sort, je les quitte.
J'attends la sortie de cette nana.
Elle sort.
"Excusez moi..."
Elle m'entend là, mais s'arrête pas.
"Excusez moi..."
Je suis une merde.
Un regard, du dédain oui.
Si honteux que je n'ose revenir chez moi.
Si honteux que je n'ose marcher droit.
Je m'assois sur un banc. Mes yeux me piquent.
Soleil tape, c'est le soir qui débute.
"Excusez moi..."
Une merde. J'arrête. Quelle est la différence...
me répètais je. La différence, quelle différence...
J'arrête.
Les filles seules, la rue, le métro, n'importe où.
J'arrête. Je n'essayerai plus jamais.
Plus jamais. Ca n'a jamais marché. Jamais.
Une fois, peut être. Anna. Oui, c'est vrai.
Une fois. Mais non, j'arrête.
Plutôt frustré qu'honteux, merdeux, tout petit.

Je rentre. Sigur Ros à fond pour éviter de parler,
de penser. Je ne veux plus rien savoir.
Des dessins sur une feuille format raisin, oui oui.
Musique. Gainsbarre, Dead can dance.
N'importe quoi d'un peu différent fera l'affaire.

Je mange. On joue quelques parties sur xbox avec Franck.
Avant l'arrîvée de Judith.
Puis ma chambre. Je veux regarder un DivX, une merde,
histoire de continuer à ne penser à rien.
Pas à ces femmes réelles là, celles de la rue et des bars,
celles du métro, celles du tout autour.
Sur le net. Vieille habitude. Je me fais ma ronde, comme
le célibataire depuis longtemps battu. Rabaché rabattu.
Qmg, etc.
Les fiches défilent. Et..
.
.
Mh.
.
Nice.
Mh.
M...
les mots sur sa fiche.
.
"2-3.."

C'est pas...

"...(Hin hin)."

C'est elle.

"...stérile..."

C'est elle.

"...salutations distinguées.."

Merde.
C'est elle.
Je n'y crois pas.
Mes mains tremblent.
Mon coeur bat trop fort.
J'ai l'impression que je vais m'étouffer.
C'est elle. C'est elle. Pas possible.
Je pense à elle tous les jours, depuis
cette connerie de coup de fil que je lui ai
passé il y a une semaine. Envie de me perdre,
stupidement. Envie d'absolu. De me sortir de...
Non. Non.
merde.
C'est elle.
17 ans. Non. Non. Pas possible.
C'est bien elle.
Des photos d'elle.

Et ainsi, je découvre après des mois, des mois,
des mois, des mois, des heures entières,
le visage de Mathilde. Le visage de Mathilde.
C'est bien elle... la même personne.
Mais c'est comme la réalité. C'est la réalité.
Aujourd'hui. Pas 22, mais 17.
Pas de dreads, juste un ^vrai sourire défoncé.
Et sur d'autres, juste elle. Une fille normale.
Son nez n'est pas pointu. Non ; rond.
Son visage. Un autre profil.
Découverte d'un autre monde.
Comme une sorte de miracle absurde.
C'est encore une petite fille, c'est elle.

Je ne sais pas ce que sont ces dernières 24h.
Je ne sais pas.
Je ne veux pas le savoir.
Crevé, foutu, ces écrans pour m'asservir,
Ce visage comme pompage coronarien,
lessivé, bide en vrac, dos autodétruit,
je vais me coucher.
Mais pour quels rêves ?
Pour quels rêves ?
Des rêves encore ? Par pitié, juste la nuit.
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