Borderline - .4.

Jan 30, 2013 23:41


BORDERLINE

.4.


Les rires synthétiques des clients. Des violons exagérément mélancoliques. Lumière tamisée, ambiance intime et snob. Champagne, vin, fromage, foie gras, truffes... et tous ces rituels et simagrée stupides de riches oisifs. JaeJoong se força à se concentrer sur son hôte, retenant un rictus écœuré. La jolie rousse qui lui servait l’intermédiaire l’observait, distraite, jouant avec son verre en cristal qu’elle faisait chanter sous ses doigts.

“Quoi ? demanda-t-il brusquement.
- Je me disais à quel point c’était dommage...”

Il roula des yeux.

“Tu as ta place ici de plein droit, parmi eux, dans le faste et la lumière. Et tu as préféré l’ombre et ses dangers, fit-elle rêveusement. Regarde-les, Hero... regarde les tous. Tu rayonnes et eux ne sont que des arrivistes étouffés par leur propre ego et bêtise.”

Elle eut un sourire en coin.

“Ce sont tous des pantins, et tu pourrais si facilement être-
- Leur maître ? coupa JaeJoong”

Il eut un sourire dédaigneux et moqueur.

“Quel intérêt, dis moi, de contrôler une bande d’idiots sans honneur ni cervelle ?
- C’est vrai que de ton côté, tu es pétri de principes ! railla la jeune femme.”

Les yeux de JaeJoong s’étrécirent.

“Je n’ai certes pas vraiment d’honneur, mais je ne me crois pas au dessus des autres si ma place est dans la fosse septique de l’humanité, grinça-t-il.”

Il s’adossa à son siège, bras croisés.

“Cet endroit est d’une puanteur insoutenable.”

Son hôte pinça les lèvres mais ne dit mot. Elle posa une enveloppe près du verre de son interlocuteur. JaeJoong le fixa un instant puis le cacha dans sa veste. Inutile de compter. Elle avait l’aimable attention de ne jamais tenter de le duper. Son prédécesseur s’y était essayé...

“Comme prévu, quatre cent mille yens maintenant, la même somme après, déclara-t-elle. Tu est toujours partant ? s’assura-t-elle.”

Au rictus que lui rendit JaeJoong, elle comprit que sa question était inutile et particulièrement ridicule.

“Tu crois que tuer un flic me gêne ? railla-t-il.
- Tout le monde à ses principes, fit-elle en haussant les épaules.
- Mais personne n'est blanc comme neige.
- Avec ce motto tu pourrais tuer tout le monde...
- Et tu préfères quoi ? Que je me noie dans les remords et la culpabilité à chaque paiement ?”

Elle grimaça.

“J'aurais préféré que la vie d'un autre ait plus de valeur pour toi.
- Tu me connais bien mal...
- Qui pourrait prétendre connaître Hero ?
- Sûrement pas toi.”

Encore moins cet idiot de lycéen, ne put-il s'empêcher de penser. Il n'aurait jamais cru qu'une personne puisse lui pourrir à ce point la vie, encore moins un gosse ! Son rêve était de ne plus croiser son chemin de toute son existence. Mais Tokyo semblait trop petite pour l'exaucer. Kazuya l'énervait autant qu'il l'intriguait. JaeJoong n'avait pas besoin de se prendre la tête avec un mystère de plus. Cependant le gamin le poussait à agir contre tout bon sens. C'était plus fort que lui.

Le nouveau poids dans sa veste lui rappela les raisons de sa présence dans ce repère de requins. Sans s'excuser ni la saluer, il faussa compagnie à son hôte et quitta la salle principale du restaurant.

“Qu'est-ce que tu fiche ici ! Fous le camp immédiatement ! siffla la voix d'un homme. Je veux pas de toi dans les parages !”

JaeJoong eut un sourire moqueur. La belle vie, n'est-ce pas ? Il dépassa les vestiaires d'où provenait les vociférations.

“Ne me dis pas ce que je dois faire, cria une voix qu'il ne connaissait que trop bien. T'as peut être signé les papiers du mariage, t'es pas plus mon père qu'avant ! Tu resteras un arriviste de merde !”

Ce fichu karma. JaeJoong était assez proche des deux personnes pour assister à la scène sans être vu, dissimulé dans l'ombre. Un homme en costume gris, massif et clairement caucasien, toisait Kazuya de toute sa hauteur. JaeJoong avait une vue imprenable sur la grimace excédée qui déformait les traits de l'homme. Manifestement, l'adolescent avait cet effet sur d'autres personnes. Ca n'avait rien à voir avec JaeJoong. A moins que l'homme ne soit doté du même type de karma.

“Et toi un parasite, grinça l'homme. Casse-toi ou j'appelle la sécurité.
- C'est l'anniversaire de ma mère, j'y vais si je le veux !
- Elle veut pas de toi dans les parages, tu piges ?
- Ca c'est toi qui le dis !”

Le beau-père mit la main à sa veste.

“Tu veux quoi, du fric ?”

Kazuya jeta les billets qu'il lui avait fourrés dans la main.

“C'est pas ton fric, cracha-t-il. C'est celui de ma mère ! Tu fous rien de la journée pour gagner le tien.”

Pris d'une étrange inspiration, l'adolescent flanqua un coup de pied dans le tibia de l'homme qui étouffa qui une exclamation de douleur.

“J'ai pas besoin de ton argent de poche, ricana Kazuya. C'est ça qui te tue ! Mon père a fait en sorte que je touche ma part même si je suis encore mineur. J'ai pas besoin de demander de l'argent, puisque j'en ai déjà !”

L'homme avait retrouvé contenance et se dressa face au garçon. Kazuya semblait insignifiant à ses côtés... parfaitement suicidaire.

“Je me fais pas entretenir comme un gigolo, acheva-t-il avec un sourire moqueur.”

Sans crier gare, l'homme l'empoigna la veste. Sa force était telle qu'il déchira les premiers boutons de sa chemise. Kazuya jura intérieurement. Pour une fois qu'il faisait l'effort de s'habiller convenablement.

“Tu fais le fier, petit morveux, mais je suis au courant de tes petites expéditions suicidaires, gronda l'homme. Ta mère n'en sait rien pour le moment, mais je pourrais très bien laisser échapper involontairement une ou deux petites allusions.
- T'as aucune preuve...
- Tu veux parier ? ricana son beau-père. Tu sais ce qu'on fait des gens comme toi ? On les enferme et on les drogue. Avec un peu de chance, on te déclarera inapte à se prendre en charge et tu seras sous tutelle toute ta vie.”

Un sourire malsain craqua les lèvres de l'homme.

“Mais on va épargner cette nouvelle épreuve à ta mère n'est-ce pas ? Deux suicidaires dans la famille, c'est trop. Il paraît que c'est génétique~”

La poigne de l'homme se fit plus forte, Kazuya se sentit soulevé au point que seule la pointe de ses pieds touchaient le sol. L'adolescent se demanda pour la millième fois où sa mère avait pu pécher une horreur pareille... son beau père eut l'air de réfléchir longuement à une question intérieure.

“Remarque, tu te fais tellement casser la gueule, que ça passera inaperçu, ricana-t-il.”

Le poing levé de son beau père se retrouva bloqué à mi-chemin. L'homme n'eut pas le temps d'apercevoir l'intrus, celui-ci l'assomma d'un bougeoir sur la tête. L'homme s'effondra lourdement sur le tapis. Kazuya fixa quelques secondes son beau-père inconscient, sidéré. Il devait absolument remercier le nouveau venu d'avoir exaucer son plus grand vœu : lui exploser le crâne. Il ne s'était pas senti aussi léger depuis longtemps. Le lycéen leva le regard, et se figea de surprise.

“Toi ?!”

JaeJoong ne lui accorda pas le moindre regard, affairé à replacer le bougeoir à sa place. Coup de chance, l'objet massif n'était pas contendant. Le beau-père du garçon s'en sortirait avant un œuf de pâques et une migraine carabinée pour quelques jours. C'était cher peu payé pour ce qu'il s'apprêtait à faire.

“Oui moi, renvoya-t-il.
- Qu'est-ce que tu fous là ? s'enquit brusquement Kazuya.
- Je te retourne la question.
- Pas tes oignons.
- Idem.”

Kazuya n'avait pas encore digéré l'incident aux docks. JaeJoong croisa les bras, sourire narquois. Ils s'affrontèrent un moment du regard. L'homme à terre grogna dans son inconscience. Kazuya décrocha le premier. Il était venu pour une bonne raison, il perdait du temps. Il tourna les talons en direction de la salle du restaurant, arrangeant rapidement sa tenue en chemin.

Il trouva sans peine sa mère, à la table habituelle qu'ils réservaient pour toutes les occasions familiales. Quand il était encore là...

“Kazu-chan ?”

Le lycéen eut un sourire gêné face à l'expression étonnée de sa mère. Elle rayonnait. Il posa la boite carrée et plate en cuir bleu sombre qu'il n'avait pas lâchée depuis le début?

“O... Otanjobi omedetto... oka-san... bredouilla-t-il.”

Sa mère l'observa, intriguée et quelque peu inquiète. Il manquait deux boutons à sa chemise. Puis elle ouvrit la boîte. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire où se mêlaient joie, tristesse et nostalgie.

“Je sais que j'ai toujours dit que c'était nul de collectionner des fleurs séchés, marmonna-t-il. En plus, elles sentent même plus. Mais... c'était un truc entre vous deux, et ça te rendait heureuse. Alors... en attendant que je devienne moins con... j'veux dire stupide... si ça peut encore te rendre heureuse, je crois que tu l'as pas encore celle là... et...”

Kazuya ne put terminer ses justifications maladroites, sa mère s'était levée et l'attira dans une étreinte vigoureuse, faisant fi des coups d'œil curieux venant des tables autour.

“... euh... on nous regarde.
- Grand bien leur fasse.”

L'adolescent avait rapidement quitté la salle, s'excusant précipitamment. Il nota avec satisfaction qu'elle avait caché la boite dans son sac. Quelque chose lui disait que le gigolo raté qui lui servait de beau-père n'en saurait jamais rien.

A son retour, le jeune homme avait disparu, laissant seul l'homme toujours dans les vapes. De nombreux clients passaient par ce couloir, pas un seul ne l'avait remarqué. C'en était risible. Kazuya ricana. L'homme grogna encore. L'adolescent se laissa aller à une irrésistible envie de lui enfoncer sa chaussure dans l'estomac. Il se sentit encore plus léger.

Il fallait avouer, c'était bien plus exaltant que de se faire tabasser dans une ruelle.

~°~
29/12/2012

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